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"Le wagon-torpille est à Liège ce que le char américain est à Bastogne"

 01 fevrier 2022 15:30   Oupeye


"Le wagon torpille, c'est comme le char américain de Bastogne". La comparaison vient de Francis Degée, le Past CEO d'ArceloMittal Liège, par ailleurs Président du Musée de la Métallurgie de Liège. Pour lui, ces wagons si particuliers ont une charge symbolique très forte et sont les témoins de l'histoire industrielle de Liège et de sa sidérurgie.

Vendredi 28 janvier, un wagon-torpille qui était entreposé avec une quinzaine d'autres sur le site de Chertal a quitté le périmètre de l'entreprise pour être tracté jusqu'à Monceau-Sur-sambre, dans des ateliers de la SNCB, où il sera complètement rénové.

Ce wagon-torpille a été fabriqué en 1963, rappelle Pascal Lefebvre, administrateur délégué et directeur de la Maison de la métallurgie, qui porte ce projet de sauvetage et de rénovation. C'est donc le modèle qui était utilisé dès l'ouverture de l'aciérie de Chertal. Ces wagons-torpilles, qu'on appelait aussi des wagons-thermos, ont été conçus pour répondre aux particularités géographiques des installations du bassin sidérurgique liégeois. Les hauts-fourneaux se trouvaient du côté de Seraing, et devaient fournir la fonte en fusion à l'aciérie, qui se trouvait de l'autre côté de Liège, à une vingtaine de kilomètres en aval, à Chertal. Pour transporter cette fonte, qui devait rester à une température entre 1200 et 1300 degrés, on a imaginé ces wagons-thermos. Ils étaient stationnés sous le haut fourneau, pour être remplis par le haut de la torpille. L'intérieur du thermo, en forme de torpille, était couvert de pierres réfractaires, pour garder la chaleur. Ces wagons étaient alors conduits en convoi jusqu'à Chertal, pour l'essentiel sur des voies qui leur étaient propres. Chaque wagon était conçu pour pouvoir faire pivoter sa torpille, de manière à la vider, une fois arrivé à l'aciérie.

La fonte était alors convertie en acier, puis transformé en "brames" (les longues barres d'acier) ou en "coils" (les bobines d'acier).

Alors que le démantèlement du site de Chertal commence en ce mois de février 2022, des férus du patrimoine industriel se sont mis en tête de sauver un de ces témoins du passé sidérurgique du bassin liégeois.

Ces wagons-torpilles sont des géants du rail : longs de près de 32 mètres, ils affichent près de 200 tonnes à vide, et peuvent contenir entre 100 et 150 tonnes de fonte. Pour répartir cette masse sur les voies, chaque torpille repose sur deux wagons porteurs, équipés chacun de 8 essieux… ce qui fait tout de même 32 roues pour chaque torpille ! 

Le wagon-torpille reviendra complètement rénové, d’ici plusieurs mois, pour être installé à un endroit qui reste à déterminer, comme témoin du passé sidérurgique liégeois.

Eric Ortmans